Inscriptions d'Hypata


Les inscriptions d'Hypata, soit une soixantaine de textes, ont été publiées à l'origine dans le corpus Inscriptiones Graecae, IX,2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908 : décrets des Aenianes, accords de proxénie, listes d'affranchissement, dédicaces honorifiques et pierres tombales (de IG IX,2 3a à IG IX,2 1319). Elles ont depuis été corrigées, mise à jour ou malheureusement perdues.

 

Sommaire :

  • Arbitrage de frontières entre Lamia et Hypata (IG IX, 2 p19)
  • Borne milliaire d'Hadrien (IG IX,2 1319)
  • Arbitrage de frontières entre Hypata et Erythrai (IG IX,2 7)
  • Inscription du gymnasiarche Evandros (IG IX,2 31)
  • Restauration du gymnase d'Hypata (IG IX,2 56)
  • Dédicace de la cité d'Hypata a auguste et ses deux fils adoptifs (IG IX, 2 40)
  • Décret des Ainianes pour des juges étrangers (IG IX,2 8)
  • Quintus Caecilius Metellus, honoré par la cité d'hypata (IG IX,2 37)
  • Lucius Licinius Lucullus, honoré par la cité d'Hypata (IG IX,2 38)
  • Lucius Sempronius Vesta Atratinus, honoré par la cité d'Hypata (IG IX,2 39)
  • Acte d'affranchissement (IG IX,2 13)

Arbitrage de frontières entre Lamia et Hypata (IG IX, 2 p19)

 

Texte latin : IG IX,2 p19 /CIL 03, 00586. (B) / CIL 03, 12306. / ILS 5947a.

Pour connaître les détails sur la pierre, regarder ici.

Traduction française : personnelle.

 

Brian Campbell (Brian Campbell, Rivers and the Power of Ancient Rome, The University of North Carolina Press, 2012. p. 100.) cite cette inscription d'Hypata pour illustrer l'utilisation des rivières dans la délimitation des frontières à l'époque romaine. Il propose une traduction en anglais de la deuxième partie de l'inscription.

 

Q GELLIO SENTIO AVGVRINO PROCOS DECRET[ ]

EX TABELLIS RECITATA KALENDIS MARTIS CVM OPTIMVS MAXIMVSQVE

PRINCEPS TRAIANVS HADRIANVS AVG SCRIPSERIT MIHI VTI ADHIBITIS MENS[ ]

RIBVS DE CONTROVERSI[ ] FINIVM INTER LAMIENSES ET HYPATAEOS COGNITA CAVSA

TERMINAREM EGOQVE IN REM PRAESENTEM SAEPIVS ET CONTINVIS DIEBVS

FVERIM COGNOVERIMQVE PRAESENTIBVS VTRIVSQVE CIVITATIS DEFENSORIBVS

ADHIBITO A ME IVLIO VICTORE EVOCATO AVGVSTI MENSORE PLACET INITIVM

FINIVM ESSE AB EO LOCO IN QVO SIDEN FVISSE COMPERI QVAE EST INFRA CON

SAEPTVM CONSECRATVM NEPTVNO INDEQVE DISCENDENTIBVS RIGOREM SER

VARI VSQVE AT FONTEM DERCYNNAM QVI EST TRANS FLVMEN SPERCHION IT[ ]

AMPHISPORA LAMIENSIVM ET HYPATAEORVM RIGOR AT FONTEM DERCYNN[ ]

SCRIPTVM DVCAT ET INDE AT TVMVLVM PELION PER DECVRSVM SIB[ ]

AT MONVMENTVM EVRYTI QVOD EST INTRA FINEM LAM[ ]

ERYCANIORVM ET PROHERNIORVM [ ]

[ ]ITHRAXVM ET SIDO[ ]

[ ] CONST[ ]

 

Q(uinto) Gellio Sentio Augurino proco(n)s(ule) decret[a] / ex tabellis recitata Kalendis Marti(i)s cum optimus maximusque / princeps Traianus Hadrianus Aug(ustus) scripserit mihi uti adhibitis mens[o]/ribus de controversi[is] finium inter Lamienses et Hypataeos cognita causa / terminarem egoque in rem praesentem saepius et continuis diebus / fuerim cognoverimque praesentibus utriusque civitatis defensoribus / adhibito a me Iulio Victore evocato Augusti mensore placet initium / finium esse ab eo loco in quo Siden fuisse comperi quae est infra con/saeptum consecratum Neptuno indeque discendentibus rigorem ser/vari usque at fontem Dercynnam qui est trans flumen Sperchion it[a ut per]/amphispora Lamiensium et Hypataeorum rigor at fontem Dercynn[am supra] / scriptum ducat et inde at tumulum Pelion per decursum Sib[---] / at monumentum Euryti quod est intra finem Lam[iensium ---] / Erycaniorum et Proherniorum [---] / [---]ithraxum et sido[---] / [---] const[---]

Décrets du proconsul Quintus Gellius, lus d'après des tablettes, aux calendes de mars. Attendu que le bon et grand prince Trajan Hadrien Auguste m'a écrit d'employer des arpenteurs afin d mettre fin à la disputes de frontières entre les Lamiens et les Hypatiens, après en avoir examiner les causes ; d'être présent sur les lieux pendant plusieurs jours consécutifs, en présence des défenseurs  des deux cités : Iulius Victor, arpenteur employé par mes soins à la demande d'Auguste, est d'avis que le début de la frontière commence à partir du lieu que j'ai reconnu comme étant Sides, qui est en-dessous d'un sanctuaire consacré à Neptune, et que, pour ceux qui descendent à partir de là, elle continue en ligne droite jusqu'à la source Dercynna, qui est de l'autre côté du Sperchios ; de sorte que, se transmettant à la double postérité des Lamiens et des Hypatiens, elle se dirige tout droit vers la source Dercynna, mentionnée ci-dessus, et de là vers la hauteur du Pélion en passant par pente de Sib(...), vers le monument d'Eurytus, qui est entre la frontière séparant les Lamiens, les Erycaniens et les Proherniens (...).

 


Cette inscription date du règne d'Hadrien, soit entre 117 et 138. On y voit le proconsul Quintus Gellius, nommé par l'empereur pour juger une dispute de frontière entre Hypata et Lamia. Depuis longtemps, on avait l'habitude en Grèce de faire appel à des juges extérieurs aux cités concernées par le litige. Par exemple,  A partir du IIe siècle avant J.C., des Romains jouent souvent ce rôle de juges externes. L'usage de la langue latine témoigne de la forte romanisation de la Thessalie à cette époque.

Malgré la précision de la description, il est difficile de reproduire la frontière ainsi délimitée, les références ayant disparues.

 


Borne milliaire d'Hadrien (IG IX,2 1319)

 

Texte latin :

  • Première édition : Supplementum. Inscriptionum Orientis et Illyrici Latinarum supplementum. Edid. TH. MOMMSEN, O. HIRSCHFELD, A. DOMASZEWSKI pars I (fasc. I-III. 1889 1893). 1902. 7359

https://archive.org/stream/ephemerisepigrap04deut#page/52/mode/1up/search/hypatis

Pour plus de détails, regarder ici.

  • Deuxième édition : Inscriptiones Graecae, IX,2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908 (IG IX,2 1319)

Traduction française : personnelle.

 

IMP · CAES · DIV · TRA

IANI · PARTHICI · F · DIVI ·

NERVAE · NEPOS · TRAIA

NVS · HADRIANVS · AVG ·

PONTIF · MAX · TRIB · POT ·

VIIll COS III

XXXI

A

Imp(erator) Caes(ar) div(i) Tra/iani Parthici f(ilius) divi / Nervae nepos Traia/nus Hadrianus Aug(ustus) / pontif(ex) max(imus) trib(unicia) pot(estate) / VIIII co(n)s(ul) III / XXXI / [λ]αʹ

 

Imperator Caesar, fils du divin Trajan vainqueur des Parthes, petit-fils du divin Nerva, Trajan Hadrien Auguste, Grand Pontife, puissance tribunitienne pour la huitième fois, consul pour la troisième fois. Trente et un milles.

 


La titulature impériale correspond à celle d'Hadrien. Ayant reçu la puissance tribunicienne pour la première fois en 117, l'inscription doit donc dater de 125. 31 milles romains font environ 45 km. Selon Jean-Claude Decourt et François Mottas (Voies et milliaires romains de Thessalie. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 121, livraison 1, 1997. p. 337), ces 31 mp (millia passum) se réfèrent à la distance séparant Hypata de Thaumakoi. En 191 av. J.-C., le général Acilius aurait emprunter cette route à partir de Thaumakoi, pour aller ravager le territoire d'Hypata (Tite-Live XXXVI, 14-15).

Cette inscription constitue, comme la précédente, un témoignage de l'action de l'empereur Hadrien dans la région.

 

 

Texte grec : IG IX,2 7

Traduction française : personnelle.

 


arbitrage de frontières entre Hypata et Erythrai (IG IX,2 7)

face a.1

 

πόλει Ἐρυθρηΐων καὶ τᾶι ἀποδ̣ίκωι πό-

λει Ὑπαταίων περὶ τᾶς δίκας ἇς ἐξε-

δίκησαν ὄρεος τοῦ ἐκ τᾶς Χάας ἐπ[ὶ]

τὰν Δέραν ․․․․․․․․ΑΝΔΕΚΑΒΙΑΣ ἔ-

κριναν οἱ δικασταὶ καθὼς οἱ προδικέ-

οντες ὑπὲρ ἑκ[α]τερᾶν τᾶν πολίων̣

σύμφωνοι γενόμενοι ἐκέλευσ[αν]

καταγράψαι τὸ κρίμα· ἀπολελυμ[έναν]

εἶμεν τὰμ πόλιν τῶν Ὑπαταίω[ν τοῦ]

ἐνκλήματος καὶ τὸ ὄρος Πεν[․․․․ ἐπί]-

κλην τᾶς πόλιος τῶν Ὑπατ[αίων εἶμεν]

καὶ ὅσα ἐκ τοῦ ἐ̣[νκλήματος τούτου γέ]-

γονεν ἀδικήμα[τα Ὑπαταίοις καὶ]

Ἐρυθρηΐοις πὸτ̣ [ἀλλάλους λελύσθαι(?)]

τά τε ὑπογραφέ̣[ντα κρίματα ἀνα]-

γράψα<ι>(?) ἐΙ[— — — — — — — —]

 

vacat

 

face b.1

 

αἰνιαρχεόντων Ἀσκλαπιάδα, Διώ-

ξου, Ἀγεμάχου, Ἀριστονόου, Ἀλε-

[ξι]μάχου, ἐν δὲ Ὑπάται ἀρχόντων

[․․․․ Ἀθ]ανάδα, Πολεμάρχου Δαμ[ί]-

[ων]ος(?)· κρίματα ἃ ἔκριναν οἱ Χαλκ̣[ι]-

[δεῖ]ς δικασταὶ Νικοκλῆς Πολιά-

[γρου], Σώστρατος Μοιρίχου, Ἀμε[ι]-

[νοκλ]ῆ̣ς Ἀνδροσθένου, Γοργίας

[․․․․․․], Ἀριστόδαμος Ἀριστίωνο[ς]

[— — — — — —]ων καὶ τοῖς ἐκδικαζομέ-

[νοις — — —] <Ὀ>νομάρχωι καὶ τοῖς α-

[— — — — — — — —]ΑΙΑΙΜΥΛ̣․Ν καὶ Πραξ[ι]

[— — — — — — — τ]οῖς Κράτωνος, Νικε-

[— — — — — — — — Δ]ικαιάρχου, Δαμο-

[— — — — — — — — — —]ου, Στρατάγωι

[— — — — — — — — — —]σίωνος, Νικοδά-

[μωι — — — —, — — — —]ωνι Ἀριστα-

[— — — — — — — — — — —]τος, Ἀν-

[— — — — — — — — — —]#⁷δάμου, Λα-

[— — — — — — — — — Ἀγλ]ωνίκωι

[— — — — — — — — — — — —]ου, Αὐτ-

[— — — — — — — — — — — —]άχου,

[— — — — — — — — — — — — —]ς

 

Face a.1

 

Pour la cité des Erythriens et la cité des Hypatiens se défendant en justice au sujet du jugement qui a été rendu sur la montagne (colline ?) qui s'étend de Khaa jusqu'au vallon (à la gorge ?) [...] ANDEKABIAS (nom du vallon ?) les juges ont décidé que (?) les défenseurs sur chacune des villes ordonnent ensemble de graver la décision judiciaire : "Puissions-nous décharger la ville des Hypatiens du chef d'accusation, que le mont Pen... (soit rattaché) aux villes des Hypatiens, que tous les torts subvenus de ce chef d'accusation (soient) dès lors (dissipés) pour les Hypayiens et les Erythriens, et que les (décisions judiciaires) pris en note soient (inscrites) ...

 

 

 

 

 

 

(espace vide)

 

Face b.1

 

L'Asklepiade des chefs des Enianes, Dioxos, Agemachos, Aristonoos, Ale(xi)machos, et les chefs à Hypata, (l'Ath)enade des chefs à Hypata, le polemarche Dam(ion)os ; les décisions judiciaires qu'ont rendues les juges de Chalcis, Nikokles fils de Polia(gros), Sostratos fils de Moirichos, Ame(inokl)es fils de Androsthenos, Gorgias (fils de ...), Aristodamos fils d'Aristion, (...) et pour ceux qui se sont fait rendre la justice (: ... O)nomarchos et les (...) AIAIMYLN et Prax(i...) les fils de Kraton, Nike(... fils de D)ikaiarchos, Damo(... fils de ...)os, Stratagos (fils de ...)sion, Nikoda(mos..., ...)on fils d'Arista(...,... fils de ...)tos, An(..., ... fils de ...)damos, La(...fils de ..., Agl)onikos (fils de ..., ... fils de ...), Aut(... fils de ..., ... fils de ...)achos, (...)



Inscription du gymnasiarche Evandros (IG IX,2 31)

 

Edition de l'inscription :

La seule indication que nous possédons concernant la pierre, se trouve dans la dernière publication du Supplementum Epigraphicum Graecum, qui précise qu'il s'agit d'un bloc de marbre ( « Marble block ») … ce qui n'a rien de très spécial.

A partir de la premier édition de l'inscription, et en tenant compte de la correction apportée par G. Daux, voici à quoi devait ressembler l'inscription (en pointillés, les zones lacunaires) :

 

ΕΥΑΝΔΡΟΣΑΓΑΘΟΚΛΕΟΣΓΥ  .  .  .  .  .  .  .  ΧΗΣΑΣΤΑΝΕΧΕΔΡΑΝ

ΤΟΝΟΙΚΟΝΤΟΝΛΟΘΤΡ  .  .  .  .  .  .  .  .  ΚΟΝΙΜΑΕΡΜΑΙΚΑΙΤΑΙΠΟΛΕΙ

 

Texte développé :

Εὔανδρος Ἀγαθοκλέος γυ[μνασιαρ]χήσας τὰν ἐξέδραν,

τὸν οἶκον, τὸν λουτρ[ῶνα καὶ τὸ ]κόνιμα Ἑρμαῖ καὶ τᾶι Πόλε[ι].

 

Traduction :

« Le gymnasiarche Evandros Agathokleos (a fait construire) la salle de conférence,

la salle de réunion, la salle de bains froids, la salle à poussière, pour Hermès et la Cité. »

  • ἐξέδρα = exedra ou exhedra

Vitruve, De l'architecture

[5,11, 2] Constituantur autem in tribus porticibus exhedrae spatiosae, habentes sedes, in quibus philosophi, rhetores reliquique, qui studiis delectantur, sedentes disputare possint.

[5,11, 2] Le long des trois portiques seront distribuées de vastes salles, avec des sièges sur lesquels les philosophes, les rhéteurs et tous ceux qui aiment les lettres pourront discourir.


  •  oἶκος = oikos

Selon le dictionnaire Liddell-Scott-Jones Greek-English Lexicon, outre la signification ordinaire de « maison », le terme peut aussi avoir celui de « salle de réunion » dans des bâtiments publiques (signification que l'on retrouve d'ailleurs dans plusieurs inscriptions) : « of public buildings, meeting-house, hall, οἶ. Κηρύκων IG22.1672.24; Δεκελειῶν ib.1237.33 »

  • λουτρῶν = loutron

Vitruve, De l'architecture

[5,11, 2] (..) a conisterio in uersura porticus frigida lauatio, quam Graeci loutron uocitant;

[5,11, 2] (..) auprès du conisterium, à l'angle du portique, le bain d'eau froide que les Grecs appellent loutron;


  • κόνιμα = κόνισμα = conisterium

Selon Harris, Cyril M. (1983. Illustrated Dictionary of Historic Architecture. Courier Dover Publications. pp. 132), il s'agit d'une pièce où les athlètes étaient enduit d'huile puis saupoudrés de fin sable : « In ancient Greece and Rome, a room appended to a gymnasium or palaestra in which wrestlers were were sprinkled with sand or dust after having been anointed with oil ». Cette pratique avait pour but de protéger du soleil et d'assurer une prise à la lutte.

 

Pour imaginer la configuration des lieux, voici un plan de gymnase grec, réalisé par Anthony Rich (Dictionnaire des Antiquités romaines et grecques, 3e ed. 1883), d'après le texte de Vitruve.

La partie financée par Evandros correspond aux lettres E (le conisterium) et F (le loutron), et peut-être R (la salle de réunion).

Gymnase d'Olympie (Wikipedia)
Gymnase d'Olympie (Wikipedia)

Restauration du gymnase d'Hypata (IG IX,2 56)

Richard Bouchon, 2009
Richard Bouchon, 2009

[— — — — — — — — — — — — —]

πόλεως τοῖς γυμνασιάρχοις Ἀ[ν]-

τάνδρῳ Ὀλυμπίχου δηνάρια χείλ[ια]

πεντακόσια, Κασσίῳ Ἐπαφρᾶ δη-

νάρια χείλια πεντακόσια εἰς τὴν

ἐπισκευὴν τοῦ γυμνασίου, Ἀγα-

θόποδι Ἀγαθόποδος καὶ Λευκίῳ

Τειμοκράτους τοῖς ταμίαι<ς> δην[ά]-

ρια ὀκτακόσια τεσσαράκοντα ἑ-

πτὰ ἥμισυ.

 

[…] les gymnasiarques de la ville, Antandros fils d'Olympichos et Kassios Epaphra ont donné chacun 1500 deniers pour la restauration du gymnase, Agathopos fils d'Agathodos et Leukios fils de Teimokratoi, les trésoriers, 847,5 deniers.


Richard Bouchon a observé que cette inscription constituait la quatrième partie d'une inscription formée par 4 autres, sur le même bloc conservé dans la cour du musée de Thèbes de Béotie : une liste d'affranchis avec en-tête (IG IX 2, 21), une deuxième liste sans en-tête (IG IX 2, 16), l'enregistrement individuel d'un affranchi oublié (IG IX 2, 22) et la présente inscription, une liste de sommes distribuées aux gymnasiarques et trésoriers de la cité.

Il a remarqué que les sommes versées étaient des multiples de 22,5 deniers, soit la taxe sur les affranchissements perçue par le koinon thessaliens dont faisait partie Hypata depuis le milieu du Ie siècle av. J-C. Au total, il a donc fallu 171 affranchis pour restaurer le gymnase de la cité, sous le mandat de l'épimélète Zoïlos (entre 127 et 132 ap. J-C).

 

Richard Bouchon, 2009
Richard Bouchon, 2009

Dédicace de la cité d'Hypata a auguste et ses deux fils adoptifs (IG IX, 2 40)

 

Texte Grec : Il s'agit d'une dédicace qui se trouvait sur la base d'une statue. Je n'ai malheureusement ni photo ni descriptif de la pierre. L'inscription a d'abord été publiée dans : G. Dittenberger, Sylloge inscriptionum graecarum, 2e édition, t. III, 1901 (Syll². 354, 3 ?, 778). Je n'ai pas pu vérifié cette information, trouvée dans un article d'André Plassart (Fouilles de Thespies et de l'hiéron des muses de l'Hélicon . Inscriptions: Dédicaces de caractère religieux ou honorifique, bornes de domaines sacrés. pp. 383-462.). Elle a ensuite été réédité dans : Inscriptiones Graecae, IX,2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908 (IG IX, 2 40). C'est cette deuxième édition que je présente ici.

 

Traduction française : personnelle

 

Αὐτοκράτορα Καίσαρα

θεὸν θεοῦ υἱὸν Σεβαστὸν

εὐεργέτην καὶ τοὺς υἱοὺς

Γάϊον Ἰούλιον Καίσαρα

Λούκιον Ἰούλιον Καίσαρα

    ἡ πόλις Ὑπάτα.

A l'empereur César,

divin, fils du divin César, Auguste,

notre bienfaiteur, et à ses fils,

Gaius Iulius César

et Lucius Iulius César.

La cité d'Hypata.


 

Commentaire :

 

La cité d'Hypata élève une statue sur la base de laquelle la cité honore d'une dédicace trois membres de la famille impériale : l'empereur Auguste, reconnu comme bienfaiteur de la cité, et ses deux fils adoptifs, Caius Julius Caesar Vipsanianus (20 av. J.-C. - 4 ap. J.-C.) et Lucius Julius Caesar Vipsanianus (juin 17 av. J.-C. - 2 ap. J.-C.). Ce sont les fils naturels d'Agrippa et de Julie, la fille d'Auguste, qui est donc leur grand-père. Il décida d'adopter ses deux petits-fils en 17 av. J.-C., à la naissance de Lucius, aucun enfant n'étant né de son union avec Livie. Grâce à la mention de Lucius, nous pouvons dater l'inscription entre 17 av. J.-C. et 2 ap. J.-C., date de naissance et de mort du garçon. Cette inscription témoigne de la relation qui liait l'empereur Auguste à la cité d'Hypata.

 

Petit rappel de la descendance d'Auguste :

  • Julia Caesaris filia ou Julia Augusti filia (39 av. J.-C. - 14 ap. J.-C.). Julie est le seul enfant naturel d'Auguste. Elle est née de son deuxième mariage.
  • Caius Julius Caesar Vipsanianus (20 av. J.-C. - 4 ap. J.-C.) adopté par Auguste en 17 av. J.-C.. Il est le fils d'Agrippa et de Julie.
  • Lucius Julius Caesar Vipsanianus (juin 17 av. J.-C. - 2 ap. J.-C.), adopté par Auguste à sa naissance en 17 av. J.-C., en même temps que son frère aîné. Il est le fils d'Agrippa et de Julie.
  • Agrippa Postumus (12 av. J.-C. - 14 ap. J.-C.), adopté par Auguste en 4 ap. J.-C., à la mort de Caius Julius Caesar Vipsanianus. Il est le fils d'Agrippa (mort au moment de sa naissance, d'où "Postumus") et de Julie.
  • Tiberius Cæsar Divi Augusti Filius Augustus (42 av. J.-C. - 37 ap. J.-C.), adopté par Auguste en 4 ap. J.-C., en même temps qu'Agrippa Postumus. C'est le futur empereur Tibère.

Décret des Ainianes pour des juges étrangers (IG IX,2 8)

 

Voici un décret honorifique de la Confédération des Ainianes pour des juges étrangers venus régler des différends entre citoyens d'Hypata à l'époque Romaine. La pratique des juges étrangers s'est développée au IIe siècle après J.-C., alors que la Grèce était devenue une province Romaine. La Confédération des Ainianes, qui avait été absorbée par la Confédération Étolienne est remise en place par Rome, qui assure ainsi un contrôle discret sur la politique locale. J'ignore malheureusement où se trouve la pierre aujourd'hui. Visiblement, il n'en reste qu'un fragment laissant apparaître les deux dernières lignes (voir sur ce point mon article "Ypati, ville martyre").

 

Texte grec : depuis 1891, cette inscription a été rééditée à plusieurs reprises (cinq fois à ma connaissance)

Le texte que je présente ici est une version personnelle que j'ai établie à partir de la reproduction visuelle du texte vu sur la pierre, que l'on peut trouver dans l'article de P. Jamot et G. Deschamps (voir l'image ci-dessous). Pour les parties manquantes, j'ai suivi les propositions des trois articles selon ce qui me semblait plausible au vu de la taille des vides, et en rapprochant cette inscriptions d'autres de même nature (IG IX,2 69 ; Gonnoi II, 91).

 

Traduction française : personnelle

 

[-------------------------------------------------------------------------------]

[-----------------------------] ν [---------------------------------------------]

[---------------------------]υτεο[-------------------------------------------]

[-----------------------]ου, Νίκα[------------------------------------------]

[--------------- Με]λανθίου, Ἰσκο [-----------------------------------]

[-- ἀποσταλ]έντες ὑπο τᾶς [πόλιος τῶν ---------- δικασ-]

[ταὶ ἐπι τ]ὰς δίκας τὰς κατὰ [-------------------------------- τάν]

[ἀναστρ]οφὰν [καὶ] τὰν ἐπιδα[μίαν ἐποιήσαντο, ὡς ἐπέ]

[βαλλεν τ]οῖς καλοῖς καὶ ἀγαθοῖς ἀ[νδράσιν, τοὺς ἔχον]-

[τας πράγμ]ατα, τοὺς μὲv πλείστους συν[έλυσαν φιλο]-

[τιμίας] οὐθὲν ἐλλείποντες, τὰς δὲ καὶ [λοιπὰς δίκας]

[τὰς ἐνε]χθείσας ἐν αὐτοὺς διέκριναν [ἀπὸ παντὸς τοῦ]

[δι]καιοτάτου, ἀξίως αὐτοσαυτῶν τε̣ [καὶ τῶν ἀποστει]-

[λά]ντων καὶ ἁμῶν καὶ τᾶς ἐνχειρισ[θείσας πίστιος.]

[Ἔδ]οξε τοῖς Αἰνιάνοις δεδόσθαι α̣[ὐτοῖς καὶ τοῖς ἐγ]-

[γ]όνοις αὐτῶν προξενίαν τε καὶ πο[λιτείαν ἀπὸ τῶν]

[Αἰ]νιάνων, καὶ γᾶς ἔγκτησιν καὶ [οἰκίας ἐν τᾶι Αἰνίδι,]

[κ]αὶ ὑπάρχειν αὐτοῖς καὶ τοῖς ἐγ[γόνοις αὐτῶν ἀσ]-

[φα]λειαν καὶ πολέμου καὶ εἰράνας, τὰ [ἀπ' Αἰνιάνων]

[διὰ] παντὸς καὶ τὰ λοιπὰ τίμια ὅσα [καὶ τοῖς ἄλλοις]

[προ]ξένοις καὶ εὐεργέταις τοῦ κοινοῦ [τῶν Αἰνιά]-

[νων] δίδοται. Ἔγγυοι τᾶς προξενίας κα[τὰ τὸν νόμον]

[-------]ντων Πολεμάρχος, [Ἀγ]ίας Τολμαίο[ς, ---------------]

[--------]α, Φαινέ̣ας Νικέα, Δαμόφαντος Φι [------------------]

 

Sous l'archontat de (noms des cinq Ainiarques), attendu que (noms des juges étrangers, l'un étant fils de Melanthios ?), ayant été envoyés par la cité des (…), en vue des procès qui opposaient (les citoyens), ont fait l'aller-retour et le séjour ici, se comportant ainsi en hommes de bien ; ceux qui avaient des désaccords, ils les ont réconciliés pour la plupart, sans jamais manquer d'honneur, et les procés restants qui avaient été intentés, ils les ont jugé au plus juste, se rendant digne d'eux-mêmes, de ceux qui les avaient envoyés, de nous et de la confiance qu'on leur avait accordée. Les Ainianes ont jugé bon de leur donner, à eux et à leurs descendants, le statut d'hôte public (proxenos), le droit de cité de la part des Ainianes, la possession d'une terre et d'une maison en Ainis, et de leur accorder l'asile, à eux et à leurs descendants, en temps de guerre comme en temps de paix, ainsi que les autres honneurs habituellement accordés aux autres hôtes publics et bienfaiteurs de la Confédération des Ainianes. Garants de l'accord du statut d'hôte public selon la loi : (…) Polémarchos, Agias Tolmaios, (…), Phainéas Nikéa, Damophantos Phi(...).


Otto Kern date ce décret de 130 av. J.-C.. Mais Louis Robert propose une date proche de 175 av. J.-C.. Les juges étranger seraient venus régler les différents qui opposaient les citoyens d'Hypata en proie à une guerre civile (voir mon article « Eupolemos vs Proxenos »). L'hypothèse contredit la seule source que nous avons sur cet événement, à savoir le texte de Tite-Live, qui raconte que la cité en détresse aurait fait appel à des juges romains et non grecs … En même temps, l'un n'exclut pas l'autre : les procès ont pu se faire en deux temps, d'abord par des juges grecs, puis, la gravité de la situation nécessita un appel au sénat Romain, comme nous le raconte Tite-Live … à moins qu'il ne s'agisse du contraire !

 


Quintus Caecilius Metellus, honoré par la cité d'hypata (IG IX,2 37)

 

Voir : B. Helly, Italiens (Les) en Thessalie au IIe et au Ier siècle av. J.-C., Bourgeoisies (Les) municipales italiennes aux IIe et Ier s. av. J.-C. - Centre J. Bérard, Institut Français de Naples 7-10 déc. 1981, Colloques internationaux du CNRS no 609, Paris

Cette inscription a été publiée dans Inscriptiones Graecae, IX, 2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908.

Je n'ai malheureusement pas de photo, ni de détails sur la pierre ...

 

Texte grec : IG IX,2 37

Traduction française : personnelle

 

τὸ κοινὸν τῶν Αἰνιάνων

Κοίντον Καικέλιον Κο-

ίντου υἱὸν Μέτελλον ἀ-

ρετᾶς ἕνεκεν καὶ εὐνοί-

ας τᾶς εἰς αὑτούς.

Le conseil des Ainianes,

à Quintus Caecilius

Metellus, fils de Quintus,

pour ses services et

sa bonté à leur égard


 

Nous avons là un décret honorifique du conseil des Ainianes, ancien organe politique de la cité d'Hypata, disparu après son absorption dans la Confédération étolienne, puis remis en vigueur à l'époque romaine.

 

Metellus intervient dans la région à trois moments de sa vie.

  • En 185 av. J.-C., comme commissaire pour l'évacuation de cités prises par Philippe V ; mais la cité d'Hypata n'étant pas concernant par les usurpations macédonienne, il est peu probable qu'elle ait honoré d'un décret ce tout jeune politicien romain.
  • En 148 av. J.-C., contre Andriskos qui s'est emparé de la Thessalie ; Hypata se trouvant à la limite sud de la région, il est difficile de savoir si le Pseudophilippe était allé jusque là. Mais rien ne l'invalide non plus.
  • En 147 av. J.-C., Metellus en campagne contre les Achéens passe par le Golfe maliaque et donc à proximité d'Hypata ; cependant, cette cité n'étant pas sur l'axe routier principal, et le général étant pressé d'en découdre avec les Achéens, il est fort possible qu'il ne soit pas passé par Hypata ; ce qui n’empêche pas non plus la cité de lui faire honneur à distance.

Le décret honorifique pour Metellus n'indique pas, comme pour l'inscription de Mégare, en qualité de quoi (préteur ou consul) il est honoré, ce qui aurait pu nous aider à dater l'inscription. Le texte est aussi assez vague quant aux services rendus, ce qui m'amènerait à penser que les Ainianes l'ont voté à l'issue des évènements de 147 av. J.-C.. S'il s'agissait d'un remerciement pour une libération de la cité d'Hypata prise par Andriskos, j'imagine que l'inscription aurait été plus précise. A mon sens, Hypata honore globalement ce grand général romain, qui en a tant fait pour la région.

 

A travers Metellus, la cité réaffirme aussi son amitié pour le peuple romain, fait qui n'avait pas été évident jusqu'à récemment : le traité de paix romano-étolien n'a que 40 ans ! La nouvelle génération a bien compris que le vent a tourné définitivement en faveur des Romains.

 

Pour plus de détails, je vous renvoie à mon article.

 


Lucius Licinius Lucullus, honoré par la cité d'Hypata (IG IX,2 38)

 

Voir : B. Helly, Italiens (Les) en Thessalie au IIe et au Ier siècle av. J.-C., Bourgeoisies (Les) municipales italiennes aux IIe et Ier s. av. J.-C. - Centre J. Bérard, Institut Français de Naples 7-10 déc. 1981, Colloques internationaux du CNRS no 609, Paris

Cette inscription a été publiée dans : Inscriptiones Graecae, IX, 2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908.

Comme pour le décret de Metellus, je n'ai hélas pas de photos ni de détails concernant la pierre ...

 

Texte grec : IG IX,2 38

Traduction française : personnelle

 

[τὸ κοι]ν̣ὸν τῶν Αἰνιάνω[ν]

[Λεύκι]ον Λικίνιον Λευκίου [υἱὸν]

Λεύκολλον ταμίαν εὐεργέ̣[ταν].

 

Le conseil des Ainianes (honore)

Lucius Licinius, fils de Lucius,

Lucullus, questeur, notre bienfaiteur.


C'est la seule inscription témoignant de la présence de Lucullus en Grèce centrale, les autres provenant d'Attique, de Délos, de Rhodes et surtout d'Asie.

Selon O. Kern, ce décret serait à dater entre -88 et -80. Nous avons en effet une indication importante : Lucullus est alors questeur. C'est d'ailleurs la seule inscription où il porte ce titre. Dans les autres inscriptions, il est proquesteur ou consul, charges supérieures à celle de questeur. Ce qui signifie aussi que ce décret de la cité d'Hypata est accordé précocément à Lucullus, avant qu'il ne devienne le fameux général richissime.

Pour plus de détails, je vous renvoie à mon article.

 


Lucius Sempronius Vesta Atratinus, honoré par la cité d'Hypata (IG IX,2 39)

 

Voir : B. Helly, Italiens (Les) en Thessalie au IIe et au Ier siècle av. J.-C., Bourgeoisies (Les) municipales italiennes aux IIe et Ier s. av. J.-C. - Centre J. Bérard, Institut Français de Naples 7-10 déc. 1981, Colloques internationaux du CNRS no 609, Paris

Voici une inscription d'Hypata, dédiée à un légat du très célèbre Marc Antoine, Lucius Sempronius Vesta Atratinus, datée d'environ 40/39 av. J.-C., alors que Marc Antoine est encore l'allié d'Octavien (futur empereur Auguste) dont il a épousé la sœur, Octavie.

 

Texte grec : Selon Hermann Dessau (Inscriptiones latinae selectae), Habbo Gerhard Lolling a vu la pierre, qu'il a dû publier pour la première fois. Malheureusement, j'ai été incapable de trouvé cette référence, n'ayant accès qu'aux ressources limitées du Web. Je n'ai donc ni photo de la pierre ni sa première édition. Cependant, B. Helly, dans l'article cité plus haut, nous dit que « L. Sempronius Vesta Atratinus a été honoré d'une statue à Hypata, vers 40 av. J.-C. ». La pierre serait donc une base de statue ? La deuxième édition de l'inscription est celle du Corpus Inscriptiones Graecae, IX,2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908 (IG IX,2 39). O. Kern n'a pas dû voir la pierre, et reproduit la texte de H. G. Lolling. La troisième publication de l'inscription par Hermann Dessau (Inscriptiones latinae selectae. Berlin 1914-1916, Vol.3, 9461) n'apporte rien de nouveau au texte de 1908, mais s'accompagne de quelques informations sur Atratinus.

Traduction française : personnelle

 

ἡ πόλις Ὑπάτα Λε̣ύκι-

ον Σενπρ<ώ>νιον Βηστί-

α υἱὸν Ἀτρατῖνον

πρεσβευτὰν καὶ ἀν-

τιστράτηγον, τὸν ἴδι-

ον εὐεργέταν.

 

La cité d'Hypata (rend honneur)

à Lucius Sempronius Atratinus,

fils de Bestia,

en sa qualité d'ambassadeur et

de propréteur, notre bienfaiteur,

à titre privé


La mention de ἴδιον que je traduis par « à titre privé », indique qu'Atratinus a aidé la cité d'Hypata personnellement, déboursant de sa poche quelque subvention. Ce n'est donc pas sur l'ordre d'Antoine, dont Atratinus est alors le légat, qu'il a agi.

Otto Kern date l'inscription d'Hypata de 39 av. J.-C.. Quelle était alors la situation de la Thessalie à ce point de l'histoire ?

 

A l'issue de l'assassinat de Jules César en mars 44 av. J.-C., Octavien (futur empereur Auguste) conclue une alliance avec Lépide et Marc Antoine, le second triumvirat, tandis que les meurtriers de César fuient en Orient. Octavien et Marc Antoine les poursuivent, traversant l'Adriatique puis la Grèce avec vingt-huit légions, jusqu'à la plaine de Philippes. Les assassins de César y sont battus en octobre 42 av. J.-C.. S'en suit un désaccord entre les deux vainqueurs, qui s'achèvera sur un nouvel accord, le pacte de Brindes en septembre 40 av. J.-C., et sur le mariage de Marc Antoine et Octavie. Antoine est le maître de l'Orient et Octavien de l'Occident.

Pour plus de détails, je vous renvoie à mon article.

 


Acte d'affranchissement (IG IX,2 13)

 

Les Inscriptiones Graecae, IX,2. Inscriptiones Thessaliae (Otto Kern. Berlin 1908), recense une vingtaine d'actes d'affranchissement retrouvés à Hypata, de IG IX, 2, 12 à IG IX, 2, 30. En voici un qui présente quelques traits caractéristiques de ce type de monument.

 

La pierre : Je n'ai malheureusement aucune information à ce sujet (voir le descriptif d'Otto Kern auquel je n'ai pas accés)

Texte grec : IG IX,2 13

Traduction : personnelle

 

[— — — — — —]Ο[— — — —]Ι̣[— — — — — —]

[— —]ΜΠ[․]ΘΥΟΝμάρχου Σεβα[σ]τήου <τα>-

[μιε]ύοντος οἱ δόντες ἀπελεύθερο<ι τ>ὰ [γι]-

[νόμ]ενα τῆς στηλογραφίας κατὰ τὸν ν[όμον]

[ἀργ]υ[ρ]ίου δεινάρια εἴκοσι δύο ἥμισυ

[ἔτους] σεβαστοῦ ἑβδόμου Καίσαρο[ς]

[Γερμα]νικοῦ Σεβαστοῦ τοῦ καὶ τρι[ακο]-

[σ]τοῦ καὶ ἑβδόμου, στρατηγοῦντο[ς]

[—]Χ̣Ο̣νου τοῦ Ἀριστομένους· Εὔπρα-

[ξις] ἀπὸ Μικκίωνος, [․]Υ[— — —]

[— — — —], Ἀφροδεισία ἀπὸ Νε[ο]-

[β]ούλου, Εὐφρόσυνον ἀπὸ Εὔφρονο[ς],

[— —]Η[—]ος ἀπὸ Φίλωνος καὶ Κλεο-

[μ]άχου καὶ Φίλωνος, Τερτία ἀπὸ Φί-

[λωνος], Σωσίκληα <ἀ>πὸ Ἀρνοφίλου, Ἐπ[ι]-

[γέ]νηα <ἀ>πὸ Κορνηλίου, Δωροθέα ἀ[πὸ]

[— —]ή<ρ>α καὶ Εὐρυνόμας καὶ Δαμο

[—, Κ]αλ<λ>ιστὼ {ν} {²⁷Ἀ<ρ>ίστων(?)}²⁷ ἀπὸ Ἀριστομέ-

[ν]ους καὶ Φιλοστράτου καὶ Θρα-

συ<β>ούλου, Εὔκληα ἀπὸ Ἀγαθο-

κλέους, Ὠφελίων ἀπὸ Ἀκρίωνο[ς]

[κ]αὶ Πολεμάρχου καὶ Ἀκρίωνος,

Ι̣ηΟ̣ὼ(?) ἀπὸ Πολυκράτη<ς> ξ[ε]-

νικῆι

Χρυσᾶς ἀπὸ Μενάνδρου καὶ Μενά-

νδρου καὶ Φιλίππου

<ξε>νικῇ.

<Μ>οιρώ.

(...)

Untel, auguste, étant trésorier,

les affranchis ayant participé à la réalisation

de l'inscription sur cette stèle, selon la loi,

en versant une somme de 22,5 deniers,

en la trente-septième année auguste,

septième année du règne de César Germanicus Auguste,

sous la stratégie de

Untel fils d'Aristoménos : Eupraxis

(affranchi) par Mikkiôn, Untel

par Untel, Aphrodeisia par 

Néoboulos, Euphrosunon par Euphronos,

Untel par Philôn, Cléomachos

et Philôn, Tertia par Philôn,

Sôsiclèa par Arnophilos,

Epigénèa par Cornèlios, Dôrothéa par

Unetelle, Eurynomas et Untel,

Kallistô par Aristoménos,

Philostratos et

Thrasyboulos, Euclèa par Agathocléos,

Ôpheliôn par Acriôn,

Polémarchos et Acriôn,

Ièoô par Polycratès

à la mode étrangère

Chrysas par Ménandros,

Ménandros et Philippe

à la mode étrangère

Moirô

 


Analyse des termes :

  • la taxe sur les affranchissement : Richard Bouchon a rassemblé un groupe d'inscriptions, qui appartenaient en fait au même bloc. Il comporte une liste d'affranchis avec en-tête (IG IX 2, 21), une deuxième liste sans en-tête (IG IX 2, 16), l'enregistrement individuel d'un affranchi oublié (IG IX 2, 22) et une liste de sommes distribuées aux gymnasiarques et trésoriers de la cité (IG IX,2 56). Il a remarqué que les sommes versées étaient des multiples de 22,5 deniers, soit la taxe sur les affranchissements perçue par la Confédération thessalienne dont faisait partie Hypata depuis le milieu du Ie siècle av. J-C. Au total, il aura fallu 171 affranchis pour restaurer le gymnase de la cité, sous le mandat de l'épimélète Zoïlos (entre 127 et 132 ap. J-C). Grâce à son analyse, nous savons aujourd'hui, que la taxe sur les affranchissements pouvait permettre de financer des travaux d'ordre public.

R. Bouchon, La taxe des affranchis et le financement de la vie publique dans les cités thessaliennes : nouvelles lectures de documents du IIe s. apr. J.-C., Proceedings of the 2nd Archaeological Meeting of Thessaly and Central Greece [AETHSE], 2009, p. 395-407

  • L'ère auguste : L'ἒτος σεβαστόν, “ère auguste” a commencé en Thessalie vers 10 après J.-C., pour une raison encore inconnue, et a servi pendant plus d'un demi-siècle. Dans cette inscription, apparaissent à la fois l'année auguste et la titulature impériale de Claude, au pouvoir depuis alors 7 ans. L'inscription date donc des années 47/8.

Helly Bruno. Actes d'affranchissement thessaliens. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 99, livraison 1, 1975. pp. 119-144.

Bouchon Richard. L’ère auguste : ébauche d’une histoire politique de la Thessalie sous Auguste. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 132, livraison 1, 2008. pp. 427-471.

  • Le stratège : il s'agit du stratège de la Confédération Thessalienne que Jules César a fait revivre en -48 et dont Hypata faisait partie depuis le milieu du Ie siècle av. J-C. Cette charge était annuelle et correspond ici à l'année 47/8. Mais il nous manque le nom du stratège, dont on connaît seulement le père, Aristoménos, inconnu par ailleurs.
  • l'absence de prostate (chef de la commission) : dans les actes d'affranchissement thessaliens, le nom de l'esclave est suivi généralement d'un autre nom propre au génitif. Mais, dans les inscriptions d'Hypata, on n'observe jamais ce génitif après le nom de l'esclave, ni d'ailleurs le patronymique du manumissor. Trois éléments suffisent : le nom usuel de l'affranchi, la préposition ἀπὸ signifiant "affranchi par", et le nom usuel de l'ancien maître de l'affranchi. Les listes d'affranchissement d'Hypata se caractérisent donc par leur simplicité et leur concision, mais pêche en précision. Une preuve de plus, à mon avis, que le nombre annuel d'affranchissements comptait plus que l'identité des personnes concernées : il s'agit bien d'une comptabilité.

Babacos Antoine M. La mention du prostate dans les affranchissements thessaliens. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 86, livraison 2, 1962. pp. 494-503.

  • la xénikè : selon une hypothèse de Richard Bouchon, l'affranchissement xénikè signifierait "à la mode étrangère". Il y aurait donc eu un double système d'affranchissement, celui du koinon des Thessaliens et celui (ancien) de la cité d'Hypata, nécessitant à chaque fois le versement de 22,5 deniers. Ce détail juridique est un fait des inscriptions de Thessalie, et on note la xénikè dans 16 actes d'affranchissement d'Hypata, ce qui en fait une mention quasi-systématique.

Richard Bouchon, Les comptes des épimélètes de la caisse des affranchissements d'Hypata à l'époque impériale: à propos de deux inscriptions récemment publiées ("ΗΟΡΟΣ" 22-25 [2010-2013], p. 327-341), Zeitschrift für Papyrologie und Epigraphik, Bd. 193 (2015), pp. 172-178