Tite-Live, Histoire romaine

 

Tite-Live, né en 59 av. J.-C. ou en 64 av. J.-C. et mort en l'an 17 dans sa ville natale de Padoue (Patavium en latin), est un historien de la Rome antique, auteur de la monumentale œuvre de l'Histoire romaine (Ab Urbe condita libri : AUC).


 Texte latin : 

  • Tite-Live, Histoire romaine. Tome XXVI, livre XXXVI. Texte établi et traduit par André Manuelian, 1983, Paris. Coll. des Univ. de France publiée sous le patronage de l'Ass. G. Budé
  • Tite-Live. Histoire romaine. Tome XXVII. Livre XXXVII. Texte établi et traduit par Jean-Marie Engel, 1983, Paris. Coll. des Univ. de France publiée sous le patronage de l'Ass. G. Budé
  • Tite-Live, Histoire romaine, tome XXXI, livres XLI-XLII, texte établi et traduit par Paul Jal, 1971, Paris. Collection des Universités de France, publiée sous le patronage de l'Association Guillaume Budé

Traduction française : personnelle


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Résumé des livres XXIV à XXXV de l'Histoire Romaine de Tite-Live
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En mars 191 av. J.-C., le sénat Romain déclare la guerre à Antiochus. Massinissa, Philippe et Ptolémée offrent leur aide à Rome. Les Epirotes, les Eléens, et les Béotiens s'allient à Antiochus, tandis qu'Hannibal lui conseille une alliance avec Philippe. Ce dernier, n'ayant pas pardonné le massacre de Cynocéphale, choisit le parti des Romains. Antiochus pénètre en Thessalie, prend Phères et Scotoussa, mais doit renoncer à Larissa. Il prend ses quartiers d'hiver à Chalcis, où il épouse une jeune fille et se livre à la débauche. Acilius arrive en Grèce et reprend les cités de Kierion, Métropolis, Pharsale, Scotoussa et Phères, avant de se diriger vers le golfe Maliaque.

 

[36, 14] Proernam inde recepit et quae circa eam castella erant. Ducere tum porro in sinum Maliacum coepit. Adpropinquanti faucibus super quas siti Thaumaci sunt, deserta urbe, iuuentus omnis armata siluas et itinera insedit et in agmen Romanum ex superioribus locis incursauit. Consul primo mittere qui ex propinquo colloquentes deterrerent eos a tali furore ; postquam perseuerare in incepto uidit, tribuno cum duorum signorum militibus circummisso interclusit ad urbem iter armatis uacuamque eam cepit. Tum clamore ab tergo captae urbis audito refugientium undique ex siluis insidiatorum caedes facta est. Ab Thaumacis altero die consul ad Spercheum amnem peruenit, inde Hypataeorum agros uastauit.

[36, 14] Le consul reprit ensuite Proerna et les forts qui  se trouvaient à proximité. Il poussa alors plus loin jusqu'au golfe Maliaque. Approchant du défilé que domine Thaumaci, toute la jeunesse, désertant la ville, courut en armes se positionner dans les forêts et les passages, et fondit des hauteurs sur l'armée romaine. Acilius envoya d'abord des officiers qui s'entretenant de près les fassent renoncer à une telle folie ; puis voyant qu'ils persistaient dans leur résolution, les faisant encercler par un tribun et deux manipules, il leur ferma le chemin de la ville aux gens armés et prit Thaumaci vide. Alors entendant les cris de la ville prise venant de derrière, les embusqués fuyant de toutes parts des forêts, furent massacrés. De Thaumaci le consul arriva en deux jours aux bords du Spercheus, et de là il ravagea les terres des Hypatiens.

 


La campagne de Thessalie par Acilius (Digital Atlas of Roman Empire)
La campagne de Thessalie par Acilius (Digital Atlas of Roman Empire)

 

Antiochus abandonné par ses alliés, se retire au Thermopyles. Tite-Live en profite alors pour évoquer la configuration du lieu et le courage des Lacédémoniens dans la fameuse bataille.

 

[36, 16] Haudquaquam pari tum animo Antiochus intra portas loci eius castris positis munitionibus insuper saltum impediebat et cum duplici uallo fossaque et muro etiam, qua res postulabat, ex multa copia passim iacentium lapidum permunisset omnia, satis fidens numquam ea uim Romanum exercitum facturum, Aetolos ex quattuor milibus - tot enim conuenerant - partim ad Heracleam praesidio obtinendam quae ante ipsas fauces posita est, partim Hypatam mittit, et Heracleam haud dubius consulem oppugnaturum, et iam multis nuntiantibus circa Hypatam omnia euastari. Consul depopulatus Hypatensem primo, deinde Heracleensem agrum, inutili utrobique auxilio Aetolorum, in ipsis faucibus prope fontes calidarum aquarum aduersus regem posuit castra.

[36, 16] Ce n'était pas du tout avec le même courage qu’Antiochus, après avoir établi son camp à l'entrée du défilé, barrait le passage par des fortifications au-dessus, et lorsqu'avec une double palissade, et même un mur, par où la chose le demandait, à partir d'une quantité importante de pierre gisant un peu partout, il eut parachevé toutes les fortifications, assez confiant que jamais les forces romaines ne pourrait constituer une armée par là, il envoya des Étoliens pris sur quatre mille – voilà, en effet, combien s'étaient rassemblés -, partie à Héraclée, devant être tenue par une défense solide, elle qui est positionnée juste en face des gorges, partie à Hypata, et Héraclée, il ne doutait pas que le consul ne l'assiège, et que déjà, de nombreux courriers lui ayant appris, autour d'Hypata tout était dévasté. Le consul, après avoir ravagé d'abord la terre d'Hypata, puis celle d'Héraclée, le secours des Étoliens s'étant montré inutile des deux côtés, plaça son camp dans les gorges mêmes, près des sources d'eau chaude, en face du roi.

 


Les Etoliens se réfugient à Héraclée. Antiochus, craignant une attaque romaine par les hauteurs, demande aux Etoliens de les défendre. Après discussion, deux milles restent dans la ville et deux milles vont se placer sur trois monts alentours. Le consul y envoie trois légats, puis harangue ses troupes rassemblées : ils ont vu plus difficile que ce défilé en Macédoine, face à un roi valeureux, contrairement à ce faible Antiochus.

 

[36, 17] Summa uirium speique eius in Aetolis fuit, gente uanissima et ingratissima : ut uos prius experti estis, nunc Antiochus experitur. Nam nec uenerunt frequentes, nec contineri in castris potuerunt, et in seditione ipsi inter sese sunt, et cum Hypatam tuendam Heracleamque depoposcissent, neutram tutati refugerunt in iuga montium, pars Heracleam incluserunt sese.

[36, 17] La totalité de ses ressources et de son espoir repose sur les Étoliens, peuple le plus fourbes et le plus ingrat : ce que vous avez éprouvé précédemment, Antiochus l'éprouve maintenant. En effet, ils ne sont pas venus en foule, et n'ont pas pu être contenus dans des camps ; ils sont même tombés en désaccord entre eux, et, après avoir exigé qu' Hypata et Héraclée soient défendues, n'ayant défendu aucune des deux, ils se sont réfugiés sur les hauteurs des montagne, tandis qu'une autre partie s'est enfermée dans Héraclée.

 


Acilius finit sa harangue sur le fait que les soldats doivent se battre non seulement pour la liberté de la Grèce, mais aussi pour le butin d’Éphèse et ouvrir la puissance romaine à l'Asie. La bataille aux Thermopyles se clôt sur la défaite d'Antiochus qui fuit pour se réfugier à Éphèse. Toutes les villes d'Eubée se rendent. Caton et Scipion vont annoncer la victoire à Rome.

Face au refus des Etoliens de demander pardon au sénat, Acilius lance l'offensive sur Héraclée et prend la ville. Il laisse les soldats piller la ville. Pendant ce temps, Philippe s'est occupé d'assiéger Lamia, qui tombe en seconde. La victoire est abandonnée aux romains.

 

[36, 26] Paucis priusquam Heraclea caperetur diebus, Aetoli, concilio Hypatam coacto, legatos ad Antiochum miserunt, inter quos et Thoas idem, qui et antea, missus est.

[36, 26] Peu de jours avant qu'Héraclée ne soit prise, les Étoliens, réunis en assemblée générale à Hypata, envoyèrent des ambassadeurs auprès d'Antiochus, parmi lesquel Thoas fut lui aussi envoyé, tout comme il l'avait été précédemment.

 


Les ambassadeurs ont pour mission de convaincre Antiochus à revenir en Grèce pour sauver les Etoliens, au risque de voir les romains passer librement en Asie avec leurs troupes. Impressionné, le roi leur envoie de l'argent et leur promet des renforts.

 

[36, 27] Ceterum Heraclea capta fregit tandem animos Aetolorum, et paucos post dies quam ad bellum renouandum acciendumque regem in Asiam miserant legatos, abiectis belli consiliis, pacis petendae oratores ad consulem miserunt. Quos dicere exorsos consul interfatus, cum alia sibi praeuertenda esse dixisset, redire Hypatam eos, datis dierum decem indutiis et L. Valerio Flacco cum iis misso, iussit eique quae secum acturi fuissent exponere, et si qua uellent alia. Hypatam ut est uentum, principes Aetolorum apud Flaccum concilium habuerunt, consultantes quonam agendum modo apud consulem foret.

[36, 27] Mais la prise d'Héraclée acheva d'abattre le courage des Étoliens, et peu de jours après qu'ils ont envoyé des ambassadeurs ranimer la guerre et mander le roi en Asie, abandonnant leurs projets de guerre, ils envoyèrent des portes-parole demander la paix au consul. Alors qu'ils commençaient à parler, le consul les interrompit disant devoir faire passer avant d'autres affaires, et, après leur avoir accordé une trêve de dix jours et avoir envoyé avec eux L. Valerius Flaccus, il les pria de retourner à Hypata, et de lui exposer ce qu'ils auraient fait avec lui, et s'ils voulaient autre chose. Lorsqu'on fut arrivé à Hypata, les chefs des Étoliens se réunirent auprès de Flaccus pour délibérer plus profondément sur la manière de présenter les choses auprès du consul.

 


Pendant le Conseil, Flaccus recommande aux étoliens une attitude de suppliants, plutôt que de faire appel aux anciens accords qu'ils ont eux-même violé. Et la délégation exprime sa soumission au consul, qui exige alors que les chefs étoliens lui soient livrés et fait prisonniers les membres de la délégation. Grâce au soutien de Flaccus.

 

[36, 28] Tum fracta Phaeneae ferocia Aetolisque aliis est, et tandem cuius condicionis essent senserunt, et Phaeneas se quidem et qui adsint Aetolorum scire facienda esse quae imperentur dixit, sed ad decernenda ea concilio Aetolorum opus esse ; ad id petere ut decem dierum indutias daret. Petente Flacco pro Aetolis indutiae datae, et Hypatam reditum est. Ubi cum in consilio delectorum, quos apocletos uocant, Phaeneas et quae imperarentur et quae ipsis prope accidissent exposuisset, ingemuerunt quidem principes condicioni suae, parendum tamen uictori censebant et ex omnibus oppidis conuocandos Aetolos ad concilium.

[36, 28] Alors, la fougue de Phaeneas et des autres Étoliens fut brisée, et enfin ils se rendirent compte de la situation dans laquelle ils se trouvaient, et Phaeneas déclara que lui-même et ceux des étoliens présents savaient bien qu'ils devaient obéir aux ordres, mais qu'afin que cela soit ratifié une assemblée des étoliens était nécessaire ; pour cela ils demandaient qu'il donne une trêve de dix jours. Flaccus réclamant en faveur des Étoliens, la trêve fut accordée et on repartit pour Hypata. Au moment où, comme Phaeneas exposa dans un conseil formé des élus, que l'on appelait apoclètes, ce qui avait été ordonné et qui était près de leur échouer, les principaux personnages gémirent sur leur sort, ils pensèrent néanmoins qu'il fallait obéir au vainqueur et convoquer les étoliens de toutes les villes en assemblée générale.

 


La foule rassemblée se révolte contre les conditions imposées par les romains et met ses espoirs dans Nicandros qui est en train de revenir de sa mission auprès d'Antiochus. Sur le chemin du retour, Nicandros est arrêté par les macédoniens et conduit auprès de Philippe, en plein repas.

[36, 29] Quod ubi nuntiatum est, uelut hospitis, non hostis aduentu motus Philippus accumbere eum epularique iussit ; atque inde dimissis aliis, solum retentum ipsum quidem de se timere quicquam uetuit ; Aetolorum praua consilia atque in ipsorum caput semper recidentia accusavit qui primum Romanos, deinde Antiochum in Graeciam adduxissent ; sed praeteritorum quae magis reprehendi quam corrigi possint, oblitum se non facturum ut insultet adversis rebus eorum ; Aetolos quoque finire tandem adversus se odia debere, et Nicandrum privatim eius diei, quo servatus a se foret, meminisse. Ita datis qui in tutum eum prosequerentur, Hypatam Nicander consultantibus de pace Romana superuenit.

[36, 29] À cette nouvelle, Philippe, s'agitant comme à l'arrivée d'un hôte et non d'un un ennemi, l'invita à prendre place à ses côtés et à se restaurer ; puis ayant renvoyé les autres, le retenant lui seul, il lui défendit de craindre quoi que ce soit de lui-même ; il se plaignit des plans tordus des Étoliens qui leur retombaient toujours sur la tête, eux qui avaient appelé en Grèce d'abord les Romains, ensuite Antiochus ; « oubliant le passé qui pouvait être davantage blâmer que corriger, il ne ferait pas en sorte d'insulter leurs malheurs ; les Étoliens eux aussi devaient en finir avec la haine qu'ils lui portaient, et Nicandros à titre privé devait garder en mémoire ce jour où il lui avait laissé la vie sauve.» Dans ces conditions, donnant des gens qui le suivent pour le protéger, Nicandros survint à Hypata en pleine délibérations sur la paix romaine.

 


[36, 30]  M'. Acilius, uendita aut concessa militi circa Heracleam praeda, postquam nec Hypatae pacata consilia esse et Naupactum concurrisse Aetolos, ut inde totum impetum belli sustinerent, audiuit, praemisso Ap. Claudio cum quattuor milibus militum ad occupanda iuga, qua difficiles transitus montium erant, ipse Oetam escendit Herculique sacrificium fecit in eo loco, quem Pyram, quod ibi mortale corpus eius dei sit crematum, appellant. (...)

[36, 30] M. Acilius, ayant vendu ou laissé à ses soldats le butin autour d'Héraclée, après avoir entendu que l'assemblée d'Hypata n'était pas à la paix et que les Étoliens s'étaient concentrés sur Naupacte pour tenir bon contre la guerre, ayant envoyé Ap. Claudio avec quatre mille hommes pour s'emparer des hauteurs, par où les franchissements des montagnes étaient difficiles, et lui-même gravit l'Oeta et offrit un sacrifice à Hercule dans l'endroit nommé Pyra, parce que c'est là que la dépouille mortelle du dieu aurait été brûlée.

 


Ruines d'un temple au lieu-dit "bûcher d'Héraclès" au Mont Oeta
Ruines d'un temple au lieu-dit "bûcher d'Héraclès" au Mont Oeta

 

Après une difficile ascension, le consul réussit à prendre Naupacte après un siège aussi dure que celui d'Héraclée. Au même moment, les achéens assiège Messène qui, favorable aux Etoliens, refuse de se joindre à leur confédération. Les romains rétablissent la paix et en profitent pour récupérer Zacynthe. Philippe continue ses conquêtes pour les romains. Quinctius obtient une trêve pour les étoliens. C'est la fin de la guerre en Grèce. Tite-Live effectue un retour en arrière sur les évènements en Italie. Caius Livius amène la flotte romaine jusqu'à Delos. Antiochus se prépare au combat naval. Les deux flottes se confrontent à Corycos. Les romains l'emportent largement et poursuivent l'ennemi jusqu'à Éphèse, où les Syriens se rendent. La flotte romaine établit ses quartiers d'hiver en territoire pergamien.

 


livre xxxvii

Après l'élection de C. Scipion et C. Laelius consuls, le sénat reprend le débat sur les Étoliens : doivent s'abandonner entièrement à la merci du sénat, ou payer mille talents. L'ambassade est finalement renvoyée sans avoir obtenu la paix. La Grèce revient à C. Scipion (Lucius Cornelius Scipio Asiaticus, frère de Scipion l'Africain), qui succède à Acilius. Rome concentre toutes ses forces armée contre les Étoliens. Ceux-ci, prévoyant un nouveau siège de Naupacte, ferment le passage aux romains sur le mont Corax. Acilius répond en s'emparant de Lamia. Passant par le mont Oeta, il se dirige vers Amphissa.

 

Acilius marche sur Amphissa (Digital Atlas of Roman Empire)
Acilius marche sur Amphissa (Digital Atlas of Roman Empire)

 

Acilius lance l'assaut de la ville en attaquant au belier en plusieurs points des murs.

 

[37, 6, 1] Multis tamen locis decussus murus erat, cum adlatum est successorem, Apolloniae exposito exercitu, per Epirum ac Thessaliam uenire. Cum tredecim milibus peditum et quingentis equitibus consul ueniebat. Iam in sinu Maliaco erat et, praemissis Hypatam qui tradere urbem iuberent, postquam nihil responsum est nisi ex communi Aetolorum decreto facturos, ne teneret se oppugnatio Hypatae nondum Amphissa recepta, praemisso fratre Africano, Amphissam ducit.

 

[37, 6, 1] Cependant le mur était ouvert en plusieurs endroits, lorsqu'on annonça que le nouveau consul (Lucius Cornelius Scipio Asiaticus), ayant fait débarquer son armée à Apollonie, venait par l'Épire et la Thessalie. Le consul arrivait avec treize mille fantassins et cinq cents chevaux. Il était déjà dans le golfe Maliaque et, ayant envoyé à Hypata des émissaires pour demander à la ville de se rendre, comme il n'avait eu aucune réponse si ce n'est qu'ils n'agiraient pas sans un commun accord des Etoliens, pour ne pas s'engager dans l'attaque d'Hypata avant d'avoir pris Amphissa, après avoir envoyé en avant son frère l'Africain, il marcha sur Amphissa.

 


Arrivée de Scipion l'Asiatique en Grèce
Arrivée de Scipion l'Asiatique en Grèce

La citadelle capitule. Les Athéniens demandent la grâce des Etoliens à l'Africain, qui se montre bienveillant, ne souhaitant pas la guerre contre eux, mais contre Antiochus.

 

[37, 6, 6] Celeriter, auctoribus Atheniensibus, frequens ab Hypata legatio Aetolorum uenit et spem pacis eis sermo etiam Africani, quem priorem adierunt, auxit, commemorantis multas gentes populosque in Hispania prius, deinde in Africa in fidem suam uenisse ; in omnibus se maiora clementiae benignitatisque quam uirtutis bellicae monumenta reliquisse. Perfecta uidebatur res, cum aditus consul idem illud responsum rettulit quo fugati ab senatu erant. Eo tamquam nouo cum icti Aetoli essent - nihil enim nec legatione Atheniensium nec placido Africani responso profectum uidebant - , referre ad suos dixerunt uelle.

 

[37, 6, 6] Aussitôt, à l'instigation des Athéniens, une délégation nombreuse des Etoliens arriva d'Hypata et le discours de l'Africain, qu'il allèrent trouver en premier, augmenta encore leur espoir de paix . Il rappela que de nombreux peuples et nations se mirent sous sa protection d'abord en Espagne, puis en Afrique ; partout, il laissa davantage le souvenir de sa bonté et de sa générosité, que celui de son courage au combat. L'affaire semblait résolue lorsque le consul en arriva à la même réponse qui les avait fait fuir du sénat. Frappés par ce discours tout à fait inattendu – en effet, rien ne semblait émaner ni de la délégation Athénienne, ni de la réponse calme de l'Africain -, les Etoliens déclarèrent qu'ils souhaitaient s'en référer à leurs concitoyens.

 


[37, 7] Reditum inde Hypatam est nec consilium expediebatur ;  nam neque unde mille talentum daretur erat et, permisso libero arbitrio, ne in corpora sua saeuiretur metuebant. Redire itaque eosdem legatos ad consulem et Africanum iusserunt et petere ut, si dare uere pacem, non tantum ostendere, frustrantes spem miserorum, uellent, aut ex summa pecuniae demerent aut permissionem extra ciuium corpora fieri iuberent. Nihil impetratum ut mutaret consul ; et ea quoque irrita legatio dimissa est.

 

[37, 7] On retourna donc à Hypata, mais l'Assemblée ne trouvait pas de solution ; en effet, il n'en était pas au point que mille talents soient payés, et, en se remettant à leur libre pouvoir, ils craignaient d'être violentés physiquement. C'est pourquoi, ils ordonnèrent aux mêmes légats de retourner auprès du consul et de l'Africain, et de demander que, s'ils voulaient vraiment leur accorder la paix, et pas seulement des promesses illusoires, qui les frustraient de tout espoir dans leur malheur, ou bien de revoir à la baisse le montant, ou bien d'ordonner que leur reddition n'implique pas les personnes des citoyens. Rien ne put faire changer d'avis le consul ; et la délégation, encore mécontente, fut renvoyée.

 


Echédème, le chef de la députation Athénienne, conseille aux Etoliens de demander une trêve de six mois, qui leur est accordée. Le siège d'Amphissa est levé et le consul se dirige vers l'Asie. Le soutient de Philippe leur permet d'atteindre l'Hellespont en passant par la Macédoine et l'Asie. La suite du livre est consacré à la campagne d''Asie, qui voit les Romains vaincre sur terre et sur mer contre Antiochus. Fin décembre 190, la délégation Etolienne arrive à Rome, mais leur maladresse leur vaut la rigidité du Sénat, qui reste sur ses positions et les engage à quitter l'Italie dans les 15 jours. Aux élections de 189, l'Etolie revient à M. Fulvius Nobilior et l'Asie à Cn. Manlius Vulso. La paix est finalement signée avec Antiochus, et l'Asie partagée entre Eumène, roi de Pergame, et les Rhodiens.

 


Livres xxxviii-xl

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Résumé des livres XXXVIII à XL de l'Histoire Romaine de Tite-Live
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livre xli

En 175 av. J.-C., après leur victoires en Istrie, en Ligurie et en Sardaigne, l'attention des Romains se focalise de nouveau sur la Macedoine, où Persée entretient le conflit entre les Dardaniens et les Bastarnes. En 174, contre toute attente, le roi passe en Grèce, traversant les montagnes de l'Oeta, pour aller consulter l'oracle de Delphes. Sur le chemin du retour, il en profite pour renouer d'amitié avec les peuples de Phthiotide, d'Achaïe et de Thessalie. La confédération achéenne, à qui Persée a proposé la même alliance,  hésite, une partie de l'assemblée craignant de froisser les Romains. Tite-Live profite de ce retour en Grèce pour raconter un épisode impliquant la cité d'Hypata.

 

[41, 25] Per haec tempora Aetolorum in semet ipsos uersus furor mutuis caedibus ad internecionem adducturus uidebatur gentem. Fessi deinde et Romam utraque pars miserunt legatos et inter se ipsi de reconcilianda concordia agebant ; quae nouo facinore discussa res ueteres etiam iras excitauit. Exulibus Hypataeis, qui factionis Proxeni erant, cum reditus in patriam promissus esset fidesque data per principem ciuitatis Eupolemum, octoginta inlustres homines, quibus redeuntibus inter ceteram multitudinem Eupolemus etiam obuius exierat, cum salutatione benigna excepti essent dextraeque datae, ingredientes portam, fidem datam deosque testis nequiquam inuocantes interfecti sunt. Inde grauius de integro bellum exarsit. C. Valerius Laeuinus et Ap. Claudius Pulcher et C. Memmius et M. Popilius et L. Canuleius missi ab senatu uenerant. Apud eos cum Delphis utriusque partis legati magno certamine agerent, Proxenus maxime cum causa, tum eloquentia praestare uisus est ; qui paucos post dies ab Orthobula uxore ueneno est sublatus ; damnataque eo crimine in exilium abiit.

 

[41, 25] A cette époque-là, un accès de folie meurtrière chez les Etoliens semblait conduire ce peuple à l'auto-destruction. Puis, fatigués, chaque partie envoya des légats à Rome, tandis qu'ils discutaient entre eux du rétablissement de la concorde ; mais pendant les pourparlers, un nouvel attentat réveilla les anciennes haines. On avait promis aux exilés d'Hypata, qui étaient du parti de Proxenos, le retour dans leur patrie sur la foi du premier citoyen de la cité, Eupolemos : en personne, fendant la foule, il vint à la rencontre des quatre-vingt hommes illustres qui étaient de retour. Reçus avec des salutations bienveillantes, les mains tendues, ils furent tués alors qu'ils franchissaient la porte de la ville, au mépris de la foi donnée et des dieux invoqués. Dès cet instant, la guerre reprit de plus belle. Caius Valerius Laeuinus, Appius Claudius Pulcher, Caius Memmius et Marcus Popilius et Lucius Canuleius arrivèrent, envoyés par le sénat. Auprès d'eux, tandis que les légat des deux partis s'affrontaient à Delphes dans un vif débat, Proxenos sembla l'emporter autant pour sa cause que pour son éloquence ; mais quelques jours plus tard, sa femme Orthobula le supprima par le poison et, condamnée pour ce crime, elle fut exilée.