Les diplomates romains honorés à Hypata au IIe et Ie siècles avant J.-C. (2) : Lucius Licinius Lucullus

Gustave Boulanger, Repas d’été à la maison de Lucullus, 1877
Gustave Boulanger, Repas d’été à la maison de Lucullus, 1877

 

A la lecture d'un article de B. Helly sur les Italiens en Thessalie avant que Rome ne fasse de la Grèce une province de son empire, trois diplomates romains honorés à Hypata ont retenu mon attention :

  • Quintus Caecilius Metellus, vers 148/6 av. J.-C.
  • Lucius Licinius Lucullus, vers 87 av. J.-C.
  • Lucius Sempronius Vesta Atratinus, vers 40 av. J.-C.

Que faisaient ces personnages en Thessalie à ces trois moments de l'Histoire ? Et pourquoi la cité d'Hypata leur a-t-elle accordé ces décrets honorifiques ?

 

Pour lire l'article qui a servit de base à ce travail :

B. Helly, Italiens (Les) en Thessalie au IIe et au Ier siècle av. J.-C., Bourgeoisies (Les) municipales italiennes aux IIe et Ier s. av. J.-C. - Centre J. Bérard, Institut Français de Naples 7-10 déc. 1981, Colloques internationaux du CNRS no 609, Paris

 

Pour le contexte historique :

Edouard Will, Histoire politique du monde hellénistique {323-30 av. J. C), Points histoire, Seuil, 2003

 

J'ai déjà analysé les relations entre Metellus et Hypata dans un précédent post. Je vais aujourd'hui m'intéresser au deuxième diplomate honoré à Hypata, le très célèbre Lucius Licinius Lucullus.

 

Qui était Lucullus ?

 

Nous connaissons sa vie essentiellement grâce à Plutarque, qui lui a consacré un chapitre des Vies. Sa biographie est mise en parallèle avec celle du Grec Cimon. Il est également cité par des historiographes latins, Tacite, Tite-Live, Velleius Paterculus, que je laisserai de côté car ils ne traitent pas de l'activité de Lucullus en Grèce.

 

Le personnage est en effet surtout connu pour sa conquête de l'Asie lors de la troisième guerre Mithridatique, qui lui a valu une fortune considérable. C'est aussi le Lucullus des fameux jardins de Rome, sur lesquels a été construite la Villa Médicis.

 

Représentation imaginaire des jardins de Lucullus
Représentation imaginaire des jardins de Lucullus
Villa Medicis à Rome
Villa Medicis à Rome

 

La vie de Lucullus se partage donc en deux périodes : avant 67 av. J.-C., sa carrière militaire jusqu'aux sommets du pouvoir, et après 67 av. J.-C., sa retraite fastueuse à Rome.

C'est la première période qui nous intéresse, celle de sa jeunesse, alors qu'il assistait Sylla en Grèce., pendant la première guerre Mithridatique.

 

Le décret honorifique des Aenianes pour Lucullus

 

Cette inscription a été publiée dans : Inscriptiones Graecae, IX, 2. Inscriptiones Thessaliae, ed. Otto Kern. Berlin 1908.

Comme pour le décret de Metellus, je n'ai hélas pas de photos ni de détails concernant la pierre ...

 

IG IX,2 38

 

[τὸ κοι]ν̣ὸν τῶν Αἰνιάνω[ν]

[Λεύκι]ον Λικίνιον Λευκίου [υἱὸν]

Λεύκολλον ταμίαν εὐεργέ̣[ταν].

 

 

Le conseil des Ainianes (honore)

Lucius Licinius, fils de Lucius,

Lucullus, questeur, notre bienfaiteur.

 


C'est la seule inscription témoignant de la présence de Lucullus en Grèce centrale, les autres provenant d'Attique, de Délos, de Rhodes et surtout d'Asie.

Selon O. Kern, ce décret serait à dater entre -88 et -80. Nous avons en effet une indication importante : Lucullus est alors questeur. C'est d'ailleurs la seule inscription où il porte ce titre. Dans les autres inscriptions, il est proquesteur ou consul, charges supérieures à celle de questeur. Ce qui signifie aussi que ce décret de la cité d'Hypata est accordé précocément à Lucullus, avant qu'il ne devienne le fameux général richissime.

 

L'activité diplomatique et militaire de Lucullus en Grèce

 

Voici ce que nous dit Plutarque :

 

Texte grec : Robert Flacelière et Emile Chambry, Plutarque. Vies. VII. Cimon, Lucullus ; Nicias, Crassus

Traduction française : personnelle

 

[2, 1] Νέος δ´ ὢν ἐν τῷ Μαρσικῷ πολέμῳ πολλὰ μὲν τόλμης δείγματα παρέσχε καὶ συνέσεως, μᾶλλόν γε μὴν αὐτὸν δι´ εὐστάθειαν καὶ πρᾳότητα Σύλλας προσηγάγετο καὶ χρώμενος ἀπ´ ἀρχῆς ἐπὶ τὰ πλείστης ἄξια σπουδῆς διετέλεσεν· ὧν ἦν καὶ ἡ περὶ τὸ νόμισμα πραγματεία.

[2, 2] Δι´ ἐκείνου γὰρ ἐκόπη τὸ πλεῖστον ἐν Πελοποννήσῳ περὶ τὸν Μιθριδατικὸν πόλεμον, καὶ Λευκόλλειον ἀπ´ ἐκείνου προσηγορεύθη καὶ διετέλεσεν ἐπὶ πλεῖστον, ὑπὸ τῶν στρατιωτικῶν χρειῶν ἐν τῷ πολέμῳ λαμβάνον ἀμοιβὴν ταχεῖαν.

 

[2, 1] Dans sa jeunesse, au moment de la guerre des Marses, il fit preuve à de nombreuses reprises d'audace et d'intelligence, et Sylla l'attira à lui surtout pour sa stabilité et sa facilité de caractère, l'employant toujours, dès le début, aux tâches méritant le plus de soin, et parmi elles, les affaires concernant la monnaie.

[2, 2] En effet, c'est sous son intendance que l'on en frappa la plus grande partie, dans le Péloponnèse, au moment de la guerre de Mithridate, et, d'après son nom, on appela (cette monnaie) « lucullienne », qui continua longtemps (à être utilisée), rendant les échanges rapides par son usage militaire pendant la guerre.

 


Depuis la Guerre Sociale (ou guerre des Marses, 91-88 av. J.-C.), le sort de Lucullus était intimement lié à celui de Sylla, qu'il avait suivi fidèlement jusque dans sa marche sur Rome contre Marius. Le rôle financier de Lucullus en Grèce sous les ordres de Sylla correspond tout à fait à la charge de questeur (sorte de trésorier) mentionnée dans l'inscription d'Hypata. Nous sommes au début de la première de Mithridate (89-85 av. J.-C.). Il s'agit alors de frapper assez de monnaie pour entreprendre la guerre en Asie.

 

L'existence des monnaies Luculliennes est bien confirmée par un témoignage épigraphique (FD III 282, l. 5-6). Comme le montre P. Assenmaker dans l'article cité ci-dessous, Lucullus a dû être envoyé par Sylla dans le Péloponnèse, tandis que ce dernier menait lui-même le siège d'Athènes. La frappe des monnaies aurait donc eu lieu entre le printemps (ou l'été) 87 av. J.-C., et l'hiver 87/6. Dès 1935, G. Daux proposait d'identifier les monnaies Luculliennes aux tétradrachmes stéphanophores syllaniens, thèse qui reste la plus vraisemblable encore aujourd'hui.

 

Assenmaker, Pierre. La frappe monétaire syllanienne dans le Péloponnèse durant la première guerre mithridatique : retour sur les monnaies "luculliennes". In: Apostolou, E. & Doyen, Ch., Το νόμισμα στην Πελοπόννησο. Νομισματοκοπεία, εικονογραφία, κυκλοφορία, ιστορία. Από την Αρχαιότητα έως και τη Νεότερη Εποχή, Ecole française d'Athènes : Athènes 2016, p.11 p.

 

 

La présence de Lucullus et Sylla en Thessalie est antérieure à cela, comme l'explique Appien au chapitre 30 de Mithridate.

 

Texte grec et traduction française : Philippe Remacle

 

[30] Σύλλας δ' ὁ τοῦ Μιθριδατείου πολέμου στρατηγὸς ὑπὸ Ῥωμαίων αἱρεθεὶς εἶναι, τότε πρῶτον ἐξ Ἰταλίας σὺν τέλεσι πέντε καὶ σπείραις τισὶ καὶ ἴλαις ἐς τὴν Ἑλλάδα περαιωθεὶς χρήματα μὲν αὐτίκα καὶ συμμάχους καὶ ἀγορὰν ἔκ τε Αἰτωλίας καὶ Θεσσαλίας συνέλεγεν, ὡς δ' ἀποχρώντως ἔχειν ἐδόκει, διέβαινεν ἐς τὴν Ἀττικὴν ἐπὶ τὸν Ἀρχέλαον.

 

[30] Sylla, qui avait été nommé par les Romains général pour la guerre contre Mithridate, passa alors pour la première fois en Grèce avec cinq légions, quelques cohortes et escadrons, et immédiatement réclama de l'argent, des renforts et des vivres de l'Étolie et de la Thessalie. Dès qu'il se crut assez fort, il avança pour attaquer Archélaos.

 


C'est sûrement à l'occasion de la sollicitation des alliés de Rome dans la région que la cité d'Hypata entre en contact avec les Romains, soit au début de l'année 87 av. J.-C..Un passage du livre II des Premières académiques Cicéron nous confirme que c'est bien cette année-là que Lucullus assuma la charge de questeur.

 

Texte grec et traduction française : M. Nisard, numérisés sur le site de Philippe Remacle

 

[2,1] (…) Ut enim [urbanis] admodum adulescens cum fratre pari pietate et industria praedito paternas inimicitias magna cum gloria est persecutus, in Asiam quaestor profectus ibi permultos annos admirabili quadam laude provinciae praefuit ; deinde absens factus aedilis, continuo praetor (licebat enim celerius legis praemio), post in Africam, inde ad consulatum ; quem ita gessit ut diligentiam admirarentur omnes ingenium agnoscerent.

 

[1] (…) Tout jeune encore, de concert avec un frère, son émule en piété filiale et en talent, il tenta l'entreprise de venger les injures paternelles, et s'y couvrit de gloire : bientôt après, envoyé questeur en Asie, il y remplit pendant plusieurs années cette charge avec toute la distinction imaginable ; nommé ensuite édile, quoique absent, il fut aussitôt après promu à la préture, car il pouvait être affranchi des délais par le bénéfice de la loi ; il partit pour l'Afrique, en revint pour exercer le consulat, et s'y comporta si bien que tout le monde admira son zèle et fut frappé de sa vive intelligence.

 


Nous apprenons donc ici qu'il était questeur à son départ pour la guerre en Asie. Il rejoignit Sylla, qui était passé en Grèce, à l'issue de son élection au consulat en -89/8. Lucullus fut donc questeur l'année suivante, en -88/87. Le décret honorifique de la cité d'Hypata pourrait dès lors dater de l'année 87 av. J.-C..

Ensuite, pourquoi la cité a t-elle honoré le questeur ? De quelles bienfaits s'agissait-il ?

Difficile à dire. Mais ce que l'on sait, c'est que Lucullus s'est illustré à plusieurs reprises par sa bonté à l'égard des Grecs.

 

Lucullus, le philhellène bienveillant

 

Plutarque montre à plusieurs reprises son intéret pour la culture grecque.

 

Sa maîtrise de la langue grecque :

 

[1, 4] Ὁ δὲ Λεύκολλος ἤσκητο καὶ λέγειν ἱκανῶς ἑκατέραν γλῶτταν, ὥστε καὶ Σύλλας τὰς αὑτοῦ πράξεις ἀναγράφων ἐκείνῳ προσεφώνησεν ὡς συνταξομένῳ καὶ διαθήσοντι τὴν ἱστορίαν ἄμεινον.

(…)

[1, 7] Περὶ μὲν οὖν τῆς φιλολογίας αὐτοῦ πρὸς τοῖς εἰρημένοις καὶ ταῦτα λέγεται· νέον ὄντα πρὸς Ὁρτήσιον τὸν δικολόγον καὶ Σισεννᾶν τὸν ἱστορικὸν ἐκ παιδιᾶς τινος εἰς σπουδὴν προελθούσης ὁμολογῆσαι, προθεμένων ποίημα καὶ λόγον Ἑλληνικόν τε καὶ Ῥωμαϊκόν, εἰς ὅ τι ἂν λάχῃ τούτων, τὸν Μαρσικὸν ἐντενεῖν πόλεμον.

[1, 8] Καί πως ἔοικεν εἰς λόγον Ἑλληνικὸν ὁ κλῆρος ἀφικέσθαι· διασῴζεται γὰρ Ἑλληνική τις ἱστορία τοῦ Μαρσικοῦ πολέμου.

 

[1, 4] Lucullus était exercé même à parler convenablement les deux langues (latin et grec), de sorte que Sylla lui-même, voulant rédiger ses mémoires, s'adressa à lui pour organiser et raconter l'histoire au mieux.

(…)

[1, 7] Sur son goût pour l'érudition donc, outre ce qui a été dit, on raconte également cela. Etant jeune, avec l'avocat Hortensius et l'historien Sisenna, à partir de quelque plaisanterie prise au sérieux, il convint de mettre à l'écrit la guerre des Marses, ayant proposé le vers ou la prose, la langue grecque ou latine, selon ce qui tomberait par hasard.

[1, 8] Et de quelque manière, il semble que le sort en vint à la langue grecque : en effet, une histoire en grec de la guerre des Marses a été conservée.

 


Son respect des villes grecques, même en temps de guerre :

 

[33, 3] (…) Σαλούστιος μὲν οὖν φησι χαλεπῶς διατεθῆναι τοὺς στρατιώτας πρὸς αὐτὸν εὐθὺς ἐν ἀρχῇ τοῦ πολέμου πρὸς Κυζίκῳ καὶ πάλιν πρὸς Ἀμισῷ, δύο χειμῶνας ἑξῆς ἐν χάρακι διαγαγεῖν ἀναγκασθέντας.

[33, 4] Ἠνίων δ´ αὐτοὺς καὶ οἱ λοιποὶ χειμῶνες. Ἤ γὰρ ἐν τῇ πολεμίᾳ διεχείμαζον ἢ παρὰ τοῖς συμμάχοις ὕπαιθροι σκηνοῦντες, εἰς δὲ πόλιν Ἑλληνίδα καὶ φίλην οὐδ´ ἅπαξ εἰσῆλθε μετὰ στρατοπέδου Λεύκολλος.

 

[33, 3] (…) Salluste dit donc que les soldats étaient mal disposés à son égard, dès le début de la guerre, après le siège de Cyzique ou encore celui d'Amisos, ayant été forcés à passer deux hivers à l'extérieur, en camps retranchés.

[33, 4] Et les autres hivers les mécontentèrent encore . Car que ce soit en territoire ennemi ou chez des alliés, ils passaient la mauvaise saison à camper en plein air, et Lucullus n'entra pas une seule fois dans une ville grecque et amie, avec son armée.

 


Dans la deuxième partie de sa vie, alors qu'il s'est retiré de la politique et vit dans le luxe, l'accueil des Grecs à sa table :

 

[41, 2] Λέγεται γὰρ Ἕλληνας ἀνθρώπους ἀναβάντας εἰς Ῥώμην ἑστιᾶν ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας, τοὺς δ´ ὄντως Ἑλληνικόν τι παθόντας, αἰσχύνεσθαι καὶ διωθεῖσθαι τὴν κλῆσιν, ὡς δι´ αὐτοὺς καθ´ ἡμέραν τοσούτων ἀναλισκομένων· τὸν οὖν Λεύκολλον εἰπεῖν μειδιάσαντα πρὸς αὐτούς, « γίνεται μέν τι τούτων καὶ δι´ ὑμᾶς, ὦ ἄνδρες Ἕλληνες· τὰ μέντοι πλεῖστα γίνεται διὰ Λεύκολλον. »

 

[41, 2] On raconte en effet qu'il reçut à sa table des Grecs de visite à Rome pendant plusieurs jours, et ces derniers, en proie à un sentiment bien grec, se sentirent gênés et déclinèrent l'invitation, (ne voulant pas) qu'à cause d'eux tant de dépenses soient faites chaque jour ; Lucullus leur dit alors en souriant : « Une part des dépenses est bien pour vous, Messieurs les Grecs, mais la plupart est pour Lucullus ! »

 


Sa maison, un foyer pour les Grecs à Rome :

 

[42, 1] Σπουδῆς δ´ ἄξια καὶ λόγου τὰ περὶ τὴν τῶν βιβλίων κατασκευήν. Καὶ γὰρ πολλὰ καὶ γεγραμμένα καλῶς συνῆγεν, ἥ τε χρῆσις ἦν φιλοτιμοτέρα τῆς κτήσεως, ἀνειμένων πᾶσι τῶν βιβλιοθηκῶν καὶ τῶν περὶ αὐτὰς περιπάτων καὶ σχολαστηρίων ἀκωλύτως ὑποδεχομένων τοὺς Ἕλληνας, ὥσπερ εἰς Μουσῶν τι καταγώγιον ἐκεῖσε φοιτῶντας καὶ συνδιημερεύοντας ἀλλήλοις ἀπὸ τῶν ἄλλων χρειῶν ἀσμένως ἀποτρέχοντας.

[42, 2] Πολλάκις δὲ καὶ συνεσχόλαζεν αὐτὸς ἐμβάλλων εἰς τοὺς περιπάτους τοῖς φιλολόγοις, καὶ τοῖς πολιτικοῖς συνέπραττεν ὅτου δέοιντο· καὶ ὅλως ἑστία καὶ πρυτανεῖον Ἑλληνικὸν ὁ οἶκος ἦν αὐτοῦ τοῖς ἀφικνουμένοις εἰς τὴν Ῥώμην.

 

[42, 1] Est aussi digne d'attention et de parole, ce qui concerne l'organisation de ses livres. En effet, il a rassemblé des œuvres multiples et bien écrites, et leur utilisation était encore plus généreuse que leur acquisition, puisque ses dépots de livres étaient accessibles à tous, et les galeries et les salles d'études accueillaient sans restriction les Grecs, qui allaient y passer la journée ensemble comme dans un lieu de hâlte des Muses, échappant avec joie aux autres nécessités.

[42, 2] Souvent aussi, lui-même faisant irruption dans les galeries, étudiait avec les érudits, et pour les affaires publiques, aidait toute personne dans le besoin ; en un mot, sa maison était un foyer et un prytanée grec pour ceux (les Grecs) qui arrivaient à Rome.

 


Au début de la Vie de Cimon, symétrique à celle de Lucullus, Plutarque nous raconte comment Lucullus a sauvé Chéronée, ville natale de l'historien. Le capitaine de cohorte Romain en garnison à Chéronée avait été tué par une troupe de jeunes de la ville, menée par un dénommé Damon. Lucullus de passage y mena l'enquête, au terme de la laquelle il détermina que la cité n'était pas responsable du crime. Plus tard, il témoigna encore une fois en faveur de la ville.

Même si l'on ignore les circonstances du décret d'Hypata, on peut supposer que la même bonté de Lucullus à l'égard de la cité a pu la conduire à honorer le Romain d'un décret.

 

Récapitulons ce que nous a appris cette inscription.

En 87 av. J.-C., le questeur (ταμίαν) Lucullus accompagne Sylla en Grèce, première étape avant la guerre en Asie contre Mithridate. En Thessalie, il est chargé par son général de rassembler des fonds et des vivres, avant de se diriger vers le Pélopponèse (où il fera frapper des monnaies qui porteront son nom). Malgré les circonstances militaires de sa venue, sa bienveillance de philhellène lui vaut les honneurs à Hypata, qui lui accorde un décret, alors qu'il est encore dans l'ombre de Sylla, mais promis à un carrière glorieuse.

 

Mise à jour du 9/1/2024 :

François de Callataÿ a rapproché en 2004 la présence de Lucullus à Hypata a une série de monnaies assez mystérieuses jusqu'alors, frappé par le koinon des Ainianes. Il s'agit de pièces d'argent arborant la tête d'Athéna Parthénos sur le modèle athénien. Le nombre important de "monétaires" (s'ils ont bien cette fonction) étonne et reste une enigme. Il ne peut s'agir d'un magistrat annuel car la période de frappe fut très courte.

 

François de Callataÿ. Le monnayage d’argent émis par les Ainianes au type d’Athéna Parthénos. In : Coins in Thessalian region. Athènes, 2004. pp. 125-156

 

Ex Sternberg XI, 20 November 1981, 85 (CHF 1900) and from the collection of G. Philipsen, Hirsch XXV, 29 November 1909, 578.
Ex Sternberg XI, 20 November 1981, 85 (CHF 1900) and from the collection of G. Philipsen, Hirsch XXV, 29 November 1909, 578.
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Z. Baudry, Les diplomates romains honorés à Hypata au IIe et Ie siècles avant J.-C. (2) : Lucius Licinius Lucullus
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